19 nov. 2008

Libéria: de faux orphelins pour attirer des donateurs

Liberia : de faux orphelinats arnaquent de généreux donateurs
Les établissements sont dans un état déplorable


Publié le 21 mai 2007 dans Afrik.com.


Au Liberia, les propriétaires d’orphelinat s’enrichissent grâce aux millions de dollars qu’ils reçoivent chaque année de généreux donateurs, alors que des milliers de prétendus orphelins vivant dans ces établissements ont encore leurs parents, ont indiqué autorités libériennes et certaines associations de défense des droits de l’enfant.


« En fait, la plupart des enfants vivant dans ces établissements ne sont pas de véritables orphelins. Les propriétaires d’orphelinat se servent d’eux pour rechercher une aide financière à l’étranger et tirent profit de leur activité », a confié à IRIN Vivian Cherue, la vice ministre libérienne de la Santé, chargée des Affaires sociales et responsable de tous les orphelinats.

Par ailleurs, beaucoup d’orphelinats sont dans un « état déplorable », et dans 11 des 15 comtés du pays, ces établissements posent de « graves problèmes de violation des droits humains », a souligné un rapport publié au mois de mars par la MINUL (Mission des Nations Unies pour le Liberia).

Le nombre d’orphelinats a considérablement augmenté au Liberia, passant de dix en 1989 à plus de 120 actuellement, selon les informations communiquées par la vice ministre de la Santé. En effet, le conflit libérien a entraîné un déplacement massif de population au cours duquel des milliers d’enfants ont perdu la trace de leurs parents.

Cependant, l’enquête menée auprès de 5 000 enfants vivant dans des orphelinats et réalisée par le ministère de la Santé avec la collaboration avec l’Unicef, a révélé que les parents de 80 pour cent des pensionnaires ces établissements étaient vivants.

Les causes du problème

D’après plusieurs experts, certains propriétaires d’orphelinat sont hostiles aux programmes de réinsertion des enfants dans leurs familles d’origine et il arrive même qu’ils séquestrent ces enfants.

« Plus il y a d’enfants dans un orphelinat et plus le propriétaire de l’établissement sollicitent une aide financière étrangère », a fait remarquer Jerolinmek Piah, directrice de l’Observatoire national pour la défense des droits de l’enfant (NACROG). « D’après nos analyses, les propriétaires d’orphelinat entretiennent des relations avec certaines organisations philanthropiques étrangères – installées parfois aux États-Unis – pour rechercher et obtenir des financements destinés aux enfants qu’il ont pris à leurs parents et qu’ils présentent comme des orphelins, alors que ces enfants ne le sont pas », a déploré Mme Piah.

Le correspondant d’IRIN a également interrogé plusieurs propriétaires d’orphelinat qui ont reconnu que tous les enfants dont ils ont la charge ne sont pas des orphelins. « La politique de notre établissement est que nous ne faisons pas distinction entre les enfants abandonnés, séparés de leurs familles ou ayant perdu leurs parents », a indiqué un propriétaire d’orphelinat, sous le couvert de l’anonymat. « Ce sont tous des enfants qui sont dans le besoin et qui sont à notre charge », a-t-il ajouté.

Quant à Enoch Stevens, propriétaire de l’orphelinat Anna Enoch de Monrovia, il a affirmé qu’il n’y avait aucun mal à faire vivre ensemble de véritables orphelins et des enfants ayant perdu trace de leurs parents et a nié le fait que son orphelinat tirait profit de la présence de ces enfants. « Les gens pensent que nous nous tirons profit de notre activité en recherchant une aide financière pour les orphelins, alors que ce n’est pas le cas. Le seul objectif de notre mission est d’aider ces enfants ».

Des enfants privés de leurs droits fondamentaux

Cependant, peu d’enfants sont traités correctement dans ces institutions, a noté le rapport de la MINUL. « Les enfants vivant dans les orphelinats du Liberia sont privés de leurs droits fondamentaux, à savoir le droit au développement, à la santé, à l’identité, à la famille, à l’éducation, aux loisirs et à la participation à des activités culturelles », a souligné le rapport.

Aucun des représentants d’orphelinat interrogés par le correspondant d’IRIN n’a voulu indiquer ses sources de financement. Mme Cherue, qui n’a pas révélé les noms des donateurs, a seulement indiqué que ces derniers étaient généralement des organisations religieuses implantées aux États-Unis.

« Le ministère de la Santé a été saisi en 2006 du cas d’un propriétaire d’orphelinat qui avait reçu plusieurs milliers de dollars américains, avant que le généreux donateur ne se rende compte que les enfants qu’il pensait aider n’étaient pas des orphelins », a expliqué la vice ministre.

« Il s’agissait d’enfants de familles habitant les quartiers voisins. Nous avons dû fermer l’orphelinat et remettre les enfants à leurs familles », a dit M. Cherue. « Cela montre bien que certains orphelinats exploitent nos enfants, et nous allons fermer tous les orphelinats qui s’adonnent à de telles pratiques ».

Selon Mme Cherue, une Commission de protection des enfants, composée d’agences des Nations Unies, d’organisations humanitaires internationales et de plusieurs ministères libériens, a démarré une campagne nationale de documentation afin d’identifier tous les enfants des orphelinats dont les parents sont encore vivants et de les réunir avec leurs familles. « Nous avons interrogé certains enfants et ils savent où vivent leurs familles et leurs parents », a-t-elle fait remarquer. « Ils n’ont donc pas leur place dans des orphelinats ».

La propriétaire d’un orphelinat du nord de Monrovia a confié au correspondant d’IRIN, sous le couvert de l’anonymat, que les Libériens étaient si pauvres que les orphelinats n’avaient pas besoin de déployer de gros efforts pour trouver des enfants. « Ce sont les parents, les tuteurs ou les membres de la famille qui nous amènent ces enfants, parce qu’ils sont au chômage et n’ont pas d’argent pour s’occuper de leurs enfants » a-t-elle affirmé.

Les défenseurs des droits de l’enfant reconnaissent que le problème est essentiellement d’ordre financier. « Nous avons observé que la pauvreté est un des facteurs à l’origine du problème car, n’ayant pas les moyens de subvenir aux besoins de leurs enfants, les parents les confient à des orphelinats », a dit Susan Grant, représentante de l’organisation caritative britannique Save the Children, au Liberia.
LIBERIA: Fake orphans to attract donor funds
Publié le 17 mai 2007 dans IRIN




Photo: IRIN
This boy is an orphan. Thousands of other children living in orphanages are not
MONROVIA, 17 May 2007 (IRIN) - Orphanages are big businesses in Liberia attracting millions of dollars in international assistance every year, yet thousands of the so-called orphans living there are not parentless at all, according to Liberian government officials and child rights activists.


“Most of the children living in almost all of the orphanages in this country are not actual orphans, but have been used by orphanage owners to seek external funding for their personal gains,” Vivian Cherue, Liberia’s deputy health minister for social welfare who is responsible for regulating orphanages told IRIN.


Furthermore, many orphanages are “sub-standard” according to a report issued in March by the Human Rights and Protection Section of the United Nations Mission in Liberia (UNMIL). In 11 out of Liberia’s 15 counties, orphanages constitute “major human rights problems,” the UNMIL report said.


The number of orphanages in Liberia has mushroomed, from just ten in 1989 to more than 120 today, according to information provided by Liberia’s health minister. The country’s civil war caused massive displacement with thousands of children having lost track of their relatives.


Yet a survey of 5,000 children in orphanages around the country conducted by the health minister in collaboration with UNICEF revealed that up to 80 percent have parents or family members who are still alive.


Why it happens


Orphanage owners block efforts to re-integrate children into their families and even snatch children, various experts told IRIN.


“The more children that an orphanage has the better they can solicit external funding,” said Jerolinmek Piah, coordinator of the National Child Rights Observation Group (NACROG).


“Based on assessments we have been carrying out those orphanage owners have established ties with some philanthropic organisations abroad - sometimes in the United States - seeking and receiving funding for children who they have taken from their families and describing them as orphans whereas they are not,” Piah said.


IRIN also interviewed the proprietors of various orphanages, some of whom freely admitted that not all children under their care are orphans.


“Our home has a policy where children who lost their parents, have been abandoned or separated from their families during the war are considered in the same category,” said one owner who spoke on the condition of anonymity.


“They are all children in need and they are with us,” the owner said.


Another orphanage owner, Enoch Stevens of the Anna Enoch Orphanage Home in Monrovia also said there was nothing wrong with mixing genuine orphans with children who cannot find their families, and denied that his orphanage was using those children for financial gain.


“People believe that we are just making profits and seeking funding for orphans, but this is not the case. Our mission is just to provide care for those children.”


No rights


Yet few children in such institutions are being cared for properly, according to UNMIL. “Children living in Liberia’s orphanages are denied basic rights – ranging from the right to development and health, to the right to identity, family, education, leisure and participation in cultural activities,” the report said.


None of the representatives of the orphanages IRIN spoke with would reveal the sources of their funds. Even the deputy health minister Cherue would not name names, other than to say most donors are faith-based organisations headquartered in the United States.


“There was a case reported to the health ministry in 2006 involving an orphanage owner where a foreign philanthropist had provided thousands of American dollars for the upkeep of the orphanage, but the donor later discovered that those children were not orphans,” the deputy minister said. “Instead they were taken from families within surrounding neighbourhoods.”


“We had to close the orphanage down and reunify the children,” Cherue said. “This shows how orphanages are exploiting our children and we are embarking on a process to close down those orphanages engaging in such acts.”


Cherue said a Children Protection Taskforce comprising UN agencies, international aid groups and government ministries, has started a nationwide documentation process to identify children in orphanages whose parents are still alive with the aim of reunifying them.


“We talked to some of the children and they know where their relatives and parents are,” she said. “[Thus] They cannot be kept in orphanages.”


The owner of one orphanage north of Monrovia who asked not to be named told IRIN that Liberians are so poor that orphanages do not need to actively go out looking for children. “It is the parents, guardians or family members who bring children to us because for lack of jobs and money they can no longer feed and care for their children,” she said.


Child advocates agree the problem is fundamentally economic. “Poverty is one underlining factor that we have observed where parents and relatives, who cannot afford to cater for their children, send them to orphanages,” Susan Grant, head of the British international children charity group, Save the Children in Liberia said.



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