A Midwestern kid's family believes his birth parents put him up for adoption. An Indian couple claim he was kidnapped from them and sold. Who's right?
—By Scott Carney
Published in MotherJones, Mars/April 2009.
Rencontrez les parents: le côté noir de l'adoption internationale.
Un enfant de la famille du Midwest croit que ses parents biologiques l'ont placé en adoption. Un couple indien affirme qu'il leur a été enlevé et vendu. Qui a raison? - Scott Carney.
Après des heures voûté derrière le volant d'une Kia louée, après avoir survolé au dessus des champs de maïs et des églises d'un petit village, je suis garé sur une rue du Midwest, en essayant de ne pas me faire remarquer. De l'autre côté, un pré-adolescent, habillé d'un short de sport argenté et d'un T-shirt de football, joue avec un bâton dans sa cour avant. Mon cœur bat douloureusement. Je me demande si je suis prêt à changer sa vie à jamais.
Je me suis préparé à ce moment depuis des mois dans la métropole du sud de l'Inde de Chennai, en parlant aux officiers de police vêtus de couleur kaki dans un endroit poussiéreux et en passant au peigne fin des piles de documents de la cour. Les preuves amassées racontent l'histoire déchirante des enfants enlevés dans des bidonvilles indiens, vendus à des orphelinats, et acheminés dans le flot global de l'adoption. Je me suis dirigé sur un cas en particulier, dans lequel la police insistait avoir retracé un enfant spécifique volé en Inde à une adresse aux États-Unis. Il y a deux jours, les parents du garçon m'ont demandé de remettre un message à la famille américaine par l'intermédiaire de leur avocat, à la recherche d'amitié et de communication. Mais après avoir voyagé dans 10 fuseaux horaires pour me rendre ici, je suis perplexe quant à la façon de procéder.
Le dossier beige écorné sur le siège passager contient des éléments de preuve -un paquet de photos, des rapports de police, des échantillons de cheveux et des documents juridiques détaillant le cas qui a croupi dans les tribunaux indiens pendant une décennie. Il y a de bonnes chances pour que personne dans le ménage de cette banlieue n'ait d'indice. J'attends que le garçon aille d'un pas tranquille vers l'arrière de la maison, puis me pousse et sonne.
Une adolescente indienne avec un curieux sourire répond à la porte. "Est-ce que votre mère est à la maison?", je bégaie. Quelques instants plus tard, une femme blonde vient à la porte avec des jeans et un sweat-shirt. Elle me regarde avec méfiance.
Le 18 février 1999, le jour où Sivagama a vu son fils Subash pour la dernière fois, il était encore suffisamment petit pour se tenir en équilibre sur sa hanche. Sivagama -qui, comme beaucoup dans l'État du Tamil Nadu, n'a pas de nom- vit dans le bidonville de Pulianthope de Chennai, un lieu aussi éloigné du Midwest américain qu'il ne l'est distance. Les enfants jouent au cricket dans les rues animées, enveloppés dans l'insupportable humidité qui dérive de l'océan Indien qui se trouve à proximité. Malgré le brouhaha, c'est considéré comme un quartier sécuritaire. Les enfants sont rarement loin de l'œil vigilant d'un voisin.
Alors, quand Sivagama avait laissé Subash près de la pompe du quartier à quelques dizaines de mètres de leur domicile, elle s'imaginait que quelqu'un le surveillerait. Et quelqu'un était en train de le surveillait. Pendant son absence de cinq minutes, dit la police indienne, un homme a probablement entraîné le tout-petit dans un pousse-pousse à trois roues. Le lendemain, Subash a été amené à un orphelinat de la périphérie de la ville qui payait en espèces pour des enfants en santé.
C'était le pire cauchemar de tout parent. Sivagama et son mari, Nageshwar Rao, un peintre en construction, ont passé les cinq années suivantes à fouiller le sud de l'Inde pour Subash. Ils ont employé les amis et la famille comme détectives privés et ont suivi les rumeurs et les faux renseignements provenant d'aussi loin vers le nord que Hyderabad, environ à 325 miles plus loin. Pour financer la recherche, Nageshwar Rao a vendu deux petites huttes qu'il avait héritées de ses parents et a déménagé la famille dans une pièce de béton avec un toit de chaume à l'ombre d'une mosquée. Le couple a également retiré leur fille de l'école afin d'épargner de l'argent; l'épreuve a plongé la famille à partir du somment de la classe moyenne-inférieure dans la pauvreté ferme. Et rien ne les a rapprochés de Subash.
En 2005, cependant, il y a eu un coup de veine. Un flic à Chennai a entendu des renseignements de deux hommes discutant haut et fort à propos de kidnapping dans un bar bondé. En vertu de l'interrogatoire, dit la police, les hommes et deux femmes complices ont admis avoir volé des enfants au nom d'un orphelinat, Malaysian Social Services (MSS), qui a exporté les enfants à des familles de l'étranger qui n'étaient pas au courant. Les ravisseurs ont été payés 10000 roupies, soit environ 236$ par enfant.
Selon un document de la police déposé à la cour, l'ancien jardinier de l'orphelinat, G.P. Manoharan, a explicitement avoué avoir empoigné Subash; les documents saisis à MSS montrent qu'un garçon à peu près du même âge a été admis le lendemain, le même jour où Nageshwar Rao a déposé le rapport de personne manquante. Il a été adopté environ deux ans plus tard. L'acte de renonciation, que j'ai passé en revue avec des documents similaires pour d'autres enfants, est une fraude, dit la police. Les conspirateurs ont changé le nom de l'enfant pour Ashraf, et concocté une fausse histoire, y compris une déclaration d'une mère fictive.
De 1991 à 2003, notent les documents déposés par la police de Chennai, MSS a organisé au moins 165 adoptions internationales, principalement aux États-Unis, les Pays-Bas et l'Australie, gagnant 250000$ en "honoraires".
En supposant que la police indienne ont les faits en ordre, le garçon qu'ils cherchent a un nouveau nom et une nouvelle vie. Il n'a aucun souvenir de sa mère indienne ou de sa langue maternelle. La plupart des adoptions internationales sont "fermées", ce qui signifie que les parents de naissance n'ont pas de droit garanti de prendre contact avec leur enfant, et la confidentialité du processus rend difficile de retracer les enfants qui pourraient avoir été adoptés sous de faux prétextes.
Après que Subash ait disparu, Sivagama est tombée dans une profonde dépression. Dix ans plus tard, elle est encore fragile, les yeux entourés de gros cernes. À la mention du nom de son fils, elle se brise en larmes, tamponnant les coins de ses yeux avec son sari.
"Pourquoi devrions-nous payer comme ça, plaide-t-elle, pour quels crimes?"
Et pourquoi un orphelinat bondé conspirerait-il pour voler des enfants des rues? Peut-être que Subash était considéré comme particulièrement adoptable en raison de sa peau claire et de sa bonne santé. À Chennai, dans l'espoir d'en savoir plus, je négocie me petite Hyundai noire passé un incessant flot de camions, de pousse-pousse de bétails errants à la périphérie de la ville, où est situé la MSS. Elle a fermé l'orphelinat et ne fait plus d'adoptions internationales, mais gère plusieurs programmes sociaux et une école pour jeunes enfants.
Je m'arrête à l'extérieur de l'édifice de couleur rose vif, sors et regarde à travers la grille de fer forgé. Un homme en chemise blanche fraîche m'intercepte rapidement et se présente comme Dinesh Ravindranath, un nom que je reconnais du rapport de police qui le liste comme un complice de l'enlèvement. Il dit qu'il administre la MSS depuis la mort de son père en 2006. Il est aussi l'avocat de la MSS.
Ravindranath me raconte que l'enquête de son organisation, qui a fait les manchettes en Inde, a éclaté hors de proportion; c'est lui la véritable victime. Il prétend que la police a utilisé leur enquête pour extorquer de l'argent de l'institution. "La loi dit que nous ne pouvons pas demander trop de choses à propos de l'histoire d'une femme qui veut donner son enfant en adoption, il nous faut donc accepter les enfants en toute bonne foi", dit-il.
Mais les actes de renonciation obtenus par Mother Jones portent les signatures des officiels de la MSS aux côtés de ceux des présumés ravisseurs qui ont admis leur avoir livré plusieurs enfants sous différents alias. Quand je fais pression sur Ravindranath à propos des frais que les suspects ont dit avoir reçus de la MSS, il prétend que la situation a été mal interprétée. "Nous donnons aux femmes 2000 ou 3000 roupies [environ 47$] quand elles viennent ici par charité, et non comme des frais pour l'enlèvement", dit-il. "Cela se passe partout dans le monde. Nous ne sommes que des boucs émissaires."
Les problèmes avec l'adoption sont certainement très répandus. Au cours de la dernière décennie, les scandales à Delhi et dans les États indiens du Gujarat, Andhra Pradesh, Maharashtra et Tamil Nadu, ont exposé des violations graves du protocole de l'adoption et des revendications des parents qui ont perdu des enfants dans des familles à l'étranger. La promesse des frais d'adoption lucratifs motive des orphelinats à créer un approvisionnement régulier d'enfants adoptables. (Il en coûte environ 14 000$ pour emmener un enfant aux États-Unis en provenance de l'Inde, n'incluant pas les frais habituels de 3500$ pour l'orphelinat.) Dans les cas les plus graves, les agences autrefois respectées, se font emballer dans la traite d'enfants, et les familles américaines bien intentionnées ne réalisent jamais qu'ils ne sont pas en train d'adopter un enfant, ils en train d'en acheter un.
Les scandales ne sont pas limités à l'Inde. En 2007, les employés de l'organisation caritative française, l'arche de Zoé, ont été arrêtés, essayant de partir du Tchad avec 103 enfants qu'ils prétendaient être des réfugiés de guerre soudanais; la police a établi plus tard que la plupart des enfants avaient été volés des familles au Tchad. Dans la province Hunan de la Chine, on a découvert une demi-douzaine d'orphelinats ayant acheté près de 1000 enfants entre 2002 et 2005, beaucoup d'entre eux se sont retrouvés dans familles à l'étranger. Le printemps dernier, une équipe d'ABC News a découvert que certaines institutions de la région achetaient encore ouvertement des enfants pour 300$ à 350$.
En 2006, les observateurs des célébrités étaient rivés sur l'adoption par Madonna, d'un orphelinat du Malawi, de David Banda, un enfant qui n'était en réalité pas un orphelin. Plus récemment, en janvier, les employés de l'agence d'adoption d'Utah, Focus on Children, ont plaidé coupables à une accusation de fraude et de violation en matière d'immigration; selon un acte d'accusations fédéral, ils avaient importé au moins 37 enfants samoans pour l'adoption après avoir trompé les parents de naissance et avoir dit aux parents adoptifs prospectifs que les enfants étaient orphelins ou abandonnés. "C'est une industrie pour exporter des enfants", explique Sarah Crowe, directrice de communication de l'UNICEF pour l'Asie du Sud. "Quand les agences d'adoption se concentrent d'abord sur les bénéfices et non sur les droits de l'enfant, ils ouvrent la porte à des abus flagrants."
La Convention de La Haye sur l'adoption internationalequi traite ce type d'exploitation à des fins criminelles, a été ratifié par 50 pays -les États-Unis l'ont signé en 2007- mais le pacte est inefficace, selon David Smolin, un professeur de droit à l'Université Samford de l'Alabama qui a adopté deux enfants de l'Inde. "La Haye a elle-même la faiblesse de se reposer sur les pays d'origine de veiller à ce que l'enfant est correctement délaissé," m'a dit Smolin par e-mail. "Les pays d'accueil ne peuvent pas se permettre de simplement prendre la parole du pays d'origine."
Smolin devrait le savoir. Ses enfants adoptives étaient placées dans des orphelinats de l'Andhra Pradesh par leur mère pour recevoir une éducation, une pratique qui n'est pas rare parmi les pauvres de l'Inde. Mais la mère analphabète a été amenée à signer un acte de renonciation par la ruse dès le début et on lui ensuite refusé quand elle a essayé de reprendre la garde de ses enfants. Les filles, de 9 et 11 ans, avaient été entraînées à dire que leur père était mort et que leur mère les avaient abandonnées, mais elles ont éventuellement dit la vérité aux Smolin. L'agence d'adoption américaine a refusé d'examiner la question. Au moment où la famille a retracé les parents de naissance, six années avaient passé, et les filles étaient acclimatées à la vie en Alabama. Bien que les enfants restent ici, les Smolin ont ouvert l'adoption; ils ont rendu visite à la famille indienne et maintenu un contact régulier.
Smolin a depuis réorienté sa carrière juridique, et il est maintenant parmi les principaux partisans des réformes de l'adoption. Le plus grand défaut de la Convention de La Haye, note-t-il, est de ne pas plafonner les frais payés par les pays riches. "Si vous ne limitez pas clairement l'argent, tous les autres règlements sont voués à l'échec", dit Smolin.
Police, avocats et défenseurs de l'adoption en Inde font écho à ce sentiment. "Si vous n'aviez pas à payer pour un enfant, alors tout cela disparaitrait", déclare le surintendant adjoint S. Shankar, l'enquêteur principal dans le cas de Subash (qui a demandé que son nom ne figure pas dans l'impression).
Lorsque la police de Chennai a pour la première fois établi un lien entre Subash aux États-Unis en se basant sur les documents de la MSS, ils ont appelé Nageshwar Rao à la station pour identifier son fils à partir d'une gamme de photos. Il a rapidement choisi un instantané que la police a récupéré d'un dossier d'orphelinat d'Ashraf. Subash était couché sur un lit confortable, habillé comme un enfant occidental, se souvient Nageshwar Rao assis sur une chaise longue en plastique dans sa demeure encombrée flanqué par la fratrie de Subash (Sasala, 17 ans et Lokesh, 15 ans). "Même après près de six ans, je l'ai reconnu immédiatement", dit-il.
Le commissaire de police a été satisfait de l'identification, mais a dit au père d'oublier son fils. Subash était mieux en Amérique. "La police m'a traité comme si je n'étais rien, mais comment puis-je être heureux que mon fils me soit volé?" demande Nageshwar Rao. "Je ne veux pas que mon fils vive toute sa vie en pensant que nous l'avons abandonné."
Au moins, il sait ce que son enfant est susceptible de devenir. Environ 300 adoptions de la MSS (étrangères et domestiques) doivent encore faire l'objet d'enquêtes; les enquêtes de la police au niveau local semblent progresser en réponse à l'attention des médias. L'enquête sur la MSS dans l'ensemble s'est déplacé à une vitesse glaciale, puisqu'elle a été passée de la juridiction municipale à celle de l'état puis à la juridiction fédérale, réduisant de portée à chaque transfert. C'est maintenant avec la Central Bureau of Investigation de l'Inde, qui est sous ordre de cour afin de poursuivre trois cas liés à la MSS où les enfants volés des bidonvilles seraient allés à des familles adoptives - en Australie, aux Pays-Bas et les États-Unis. Ce dernier est le cas de Subash.
Shankar, l'agent en charge, admet que l'enquête de son agence ne fait que gratter la surface du problème. En réalité, une famille qui ne peut pas se payer un avocat pour mener sa revendication de l'enlèvement d'enfant par le biais de la procédure judiciaire verra probablement le cas aller nulle part. "À ce point, tout ce que nous voyons sont des cas vieux de 10 ans", dit le flic costaud aux cheveux gris. Il dit que d'autres orphelinats ont été élevés pour remplacer la MSS. "Mais je n'ai aucun pouvoir d'enquête, ajoute-t-il. "Mes mains sont liées."
Il n'a pas été trop difficile, cependant, d'obtenir l'adresse de la famille américaine dans les dossiers de la Haute Cour de Chennai -elle figure sur le document juridique qui rend l'adoption officielle. Lorsque je dis à Nageshwar Rao que je vais voyager aux États-Unis pour prendre contact avec la famille, il touche mon épaule et me regarde intensément. Il a été très soulagé quand la police lui a dit que son fils était adopté, et non pas victime de la traite dans le commerce du sexe ou vendu à des courtiers d'organes comme il avait entendu. Maintenant, il veut seulement un rôle dans la vie de Subash. Avec les quelques mots d'anglais à sa disposition, il a du mal à exprimer ses espoirs. En faisant des gestes en l'air, vers l'Amérique, il dit, "Family" (Famille). Puis il se pointe. "Friends" (Amis), dit-il.
Deux jours et 8000 miles plus tard, sur un perron avant dans le Midwest, je trouve la communication aussi difficile. Tenant fermement le dossier des preuves, je me présente, avides des bons mots. Le garçon est revenu de l'arrière de la maison et se tient debout à côté de moi; sa sœur est en train d'écouter juste à l'intérieur. Je dis à la maman que nous devons parler, mais pas devant les enfants. Nous nous mettons d'accord pour se réunir ailleurs après que son mari soit rentré à la maison.
Une heure plus tard, dans un parc vide à deux pâtés de maisons, je m'appuie contre mon véhicule de location, vérifiant ma montre toutes les minutes. Enfin, le père arrive. Il ne sort pas mais baisse la vitre pour parler. Il ne semble pas surpris par ce que j'ai à lui dire. "J'ai vu quelque chose à ce sujet dans l'actualité il y a quelques années. Je savais que c'était une possibilité, dit-il, je n'ai jamais été en mesure de parler à mon fils à ce sujet. Ça serait trop traumatisant." Il lance un sourire nerveux, et je lui passe le dossier. Ça comprend la lettre assurant que les parents de Subash ne cherchent pas à réclamer le garçon mais espèrent que sa nouvelle famille s'engagera dans une communication afin que les parents indiens puissent encore faire partie de sa vie. Je demande au père de regarder les matériaux, et nous organisons pour se réunir à nouveau dans 24 heures.
La famille américaine n'a pas passé directement par la MSS. Comme pour la plupart, ils ont utilisé une agence. J'ai visité cette institution, et mes éditeurs et moi luttons avec la question de savoir si nous devrions la nommer ici; il y a de sérieuses questions quant à la conduite des agences d'adoption aux États-Unis sur les cas d'enfants volés qui devraient être abordés ouvertement. Pourtant, nous avons décidé de retenir cette information et autres détails qui pourraient avoir identifié la famille, parce que la vie privée de l'enfant l'emporte sur l'impératif de journalisme de fournir tous les faits.
L'agence basée au Midwest en question a organisé des centaines d'adoptions internationales au cours des années. Juste à l'entrée de ses bureaux -un bâtiment en brique situé en face d'une école primaire- se trouvent un panneau d'affichage débordant de photos usées d'enfants du monde entier. Je trouve la co-propriétaire assise derrière la réception. Elle n'est pas heureuse de faire ma connaissance.
Elle reconnaît qu'elle a suivi les scandales d'adoption dans la presse indienne mais elle maintient que le gouvernement indien a signé tous les cas dont son agence a servi de courtier. Elle va collaborer à une enquête en cas de besoin, mais ne discutera du cas avec moi. Lorsque je demande à la femme pourquoi elle n'a jamais contacté la famille pour les avertir qu'ils pouvaient avoir adopté un enfant kidnappé, elle refuse de commenter.
L'agence n'a jamais été l'objet d'une enquête pour tout ce qui concerne les adoptions internationales, affirme un avocat pour le département d'état qui gère les adoptions, et le Ministère n'était pas au courant de quelque irrégularité que ce soit. Même lorsque les plaintes font surface, l'État a peu de pouvoir d'enquête. "Tout ce que nous avons est la paperasse, explique l'avocat, et nous ne pouvons que regarder la validité de la documentation." Alors que les adoptions de l'Inde ont besoin d'une tenue de dossiers, il n'y a aucune façon de savoir si un document est forgé, ajoute-t-elle; la communication entre les autorités indiennes et américaines sur cette question est pratiquement nulle.
En bref, il n'existe aucun moyen de savoir exactement d'où certains de ces enfants viennent. Au cours de ses 10 ans de mandat dans une agence américaine maintenant connue sous le nom de Families Thru International Adoption, Beth Peterson a travaillé en étroite collaboration avec certains des plus grands et des plus respectés des orphelinats indiens, aidant à organiser des foyers américains pour plus de 150 enfants. Dans le processus, elle en est venue à croire que de nombreux orphelinats sont devenus de facto des entreprises qui se livrent à des activités criminelles. C'est peu probable de changer tant que l'incitation financière reste, dit Peterson, qui dirige actuellement iChild, un site Web d'assistance pour les familles adoptant de l'Inde.
Avant 2002, par exemple, Peterson a envoyé plus de 150 000$ à un orphelinat indien appelé Preet Mandir. Les conditions étaient terribles -trois bébés y sont morts en attendant l'autorisation d'adoption par les clients de Peterson. Et lorsque le directeur de l'orphelinat J. Bhasin a commencé à exiger illégalement des milliers de dollars au-dessus et au-delà des dons habituels, et ne cédait pas les enfants sans les paiements, Peterson a rompu la relation. (Plus tard, elle a déposé une plainte au sujet de Preet Mandir et de son directeur auprès du gouvernement indien.)
Quatre ans plus tard, les reporters de la télévision indienne du réseau d'information CNN-IBN ont approché Preet Mandir en se faisant passer pour des parents adoptifs, et Bhasin leur a dit qu'ils pourraient acheter deux enfants pour 24 000 $. L'histoire a conduit à la révocation de la licence d'adoption de l'orphelinat, mais le gouvernement indien l'a depuis rétablie sur une base probatoire. "Le motif du profit existe des deux côtés", dit Peterson. "Une agence américaine avec qui j'ai travaillé voulait juste savoir que je pourrais leur obtenir un certain nombre de bébés par année, et n'était pas intéressée de savoir d'où ils venaient."
En général, tant que les documents semblent être dans l'ordre, les agences d'adoption américaines ont tendance à ne pas chercher beaucoup plus loin. Children's Home & Family Services Society, l'une des plus importantes agences de l'Amérique, a organisé près de 600 adoptions internationales l'année dernière. David Pilgrim, vice-président des services d'adoption, se dit convaincu qu'aucun des enfants provenaient de source non éthique. "Nous avons soigneusement passé en revue tous les orphelinats que nous avons, à la fois dans le passé et dans le présent", dit-il.
Toutefois, Children's Home Society a collaboré avec Preet Mandir jusqu'à ce que le scandale éclate. Sur la question de savoir si l'une de ces adoptions le concernait, Pilgrim s'arrête. "Nos avocats ont étudié les documents et n'ont pas vu de raison de s'inquiéter", dit-il.
Une journée après ma première rencontre avec le couple américain, nous sommes assis ensemble sur une table de pique-nique dans un parc froid. Des larmes coulent le long des joues de la mère. Je ne peux pas dire si elle est en colère ou a le cœur brisé. Peut-être les deux. "Pour lui, l'Inde n'existe pas", dit-elle.
Le couple me dit que le garçon - à qui ils ont donné un nouveau nom- est leur troisième adoption de l'Inde. Bien que la famille ait utilisé une nouvelle agence dans son cas, le processus n'était pas très différent; ils ont payé 15000$ en frais, et se sont envolés pour l'Inde pour voir l'orphelinat et rencontrer les propriétaires de MSS. "Nous avions eu des embêtements d'adoption", explique le mari. "Les règlements changent tellement. Nous nous sommes penchés sur la Corée et l'Amérique du Sud, mais l'Inde était la plus ouverte" -au sens le moins difficile.
J'ai dit au couple tout ce que je sais à propos de l'affaire de la police indienne - les confessions des présumés ravisseurs, l'âge de l'enfant et le moment de l'admission à l'orphelinat, le faux acte de renonciation, la photo d'identification du père, le document légal de renonciation d'Ashraf dans leur ménage. Mais ils ne sont pas encore convaincus. "Nous avons besoin d'en savoir plus pour y croire", dit le mari. Une preuve d'ADN pourrait être la seule façon de savoir à coup sûr. Mais qu'est-ce que vous dites à l'enfant qui va faire le test sanguin? Et si c'est négatif, comment la famille en Inde sera certaine que les échantillons ont été correctement prélevés?
Une étape intermédiaire pour les deux familles pourrait être de prendre contact. Mais les parents américains n'ont pas décidé où ils en sont. "Nous devons parler avec notre avocat", dit le mari avec un froncement de sourcils. "Nous devons considérer le meilleur intérêt de notre fils. Qu'est-ce que ça lui ferait s'il le découvrait?"
Il n'y a pas de feuille de route pour ce qui vient après. Comme Nageshwar Rao a découvert, il y a peu de volonté politique de poursuivre le vol d'enfants. Avec le passage des années, les limites éthiques croissent plus confuses, même si cela vaut la peine de réfléchir si une morale de prescription serait appliquée dans le cas d'un enfant américain enlevé et élevé dans un bidonville indien.
La Convention de La Haye n'est pas d'un grand recours. Elle n'établit pas de plan si les enfants volés doivent être rendus à leurs parents de naissance, ni ne considère l'impact d'une telle réunion sur un enfant qui n'a aucune mémoire de ses parents. René Hoksbergen, qui étudie l'adoption en tant que professeur de psychologie senior à l'Université d'Utrecht aux Pays-Bas, dit que le garçon devrait entendre l'histoire éventuellement. "La question de l'enlèvement pourrait être dite de différentes manières, mais pas maintenant, l'enfant est trop jeune pour cela", m'a dit Hoksbergen par e-mail. Entretemps, dit-il, les parents américains devraient contacter les parents indiens et leur envoyer des informations et des photos pour les aider à soulager leur douleur. Tant que tous conviennent que c'est le même enfant.
Et c'est là que les choses deviennent encore compliquées. De retour à Chennai, deux mois après notre rencontre dans le parc, je n'ai pas entendu un piaillement du couple américain. Ils ignorent mon suivi des courriels, et Sivagama et son mari sont en détresse. "Vous les avez rencontrés, vous me dites qu'ils sont de bonnes personnes, et vous avez vu notre fils, alors pourquoi ne nous parleront-ils pas?", implore Nageshwar Rao. "Nous savons qu'il est dans un bon foyer. Il n'est pas réaliste pour nous de lui demander de revenir mais laissez-nous au moins le connaître."
Il me pousse à envoyer un autre e-mail aux Américains, celui-ci décrivant plusieurs marques de naissance et une petite cicatrice qui ne sont pas mentionnées dans le dossier que je leur ai donné. Dans la matinée, je trouve une réponse dans ma boîte de réception. Le père adoptif répond que son fils n'a aucune des marques décrites par Nageshwar Rao. "À ce stade, nous ne ferons rien d'autre, conclut-il, s'il vous plaît transmettez nos condoléances à la famille. Nous comprenons ce qu'ils doivent traverser et quel coup ce sera pour eux."
Quand je partage cette information avec le surintendant du député Shankar, le flic est sceptique. "Ils pourraient mentir, ou peut-être que les marques de naissance ont disparu", murmure-t-il pensif. "Nous n'avons aucun doute que nous avons fait l'appariement, tout pointe dans la direction [de la famille américaine]."
En outre, dit-il, l'affaire pourrait bientôt être réglée une fois pour toutes - une demande d'Interpol faite à son agence en août dernier pour des échantillons de sang et des cheveux de l'enfant a finalement atteint le bureau du procureur général des États-Unis. De là, ça pourrait se détourner vers le FBI pour le suivi.
Même cela n'est pas une garantie. Si le couple décide de lutter contre une demande de FBI, un bon avocat pourrait probablement lier la question jusqu'à ce que l'enfant atteigne l'âge adulte - dans lequel cas, toute décision en la matière reviendrait au jeune homme.
Mais Nageshwar Rao demeure optimiste. Il continue avec ses randonnées habituelles vers un immeuble de bureaux près de la Haute Cour, où il échange du travail manuel pour la représentation de l'un des meilleurs avocats de Chennai. Il monte les marches de béton vers un bureau à l'arrière, passant les fenêtres à verre poli où des greffiers classent des centaines de mémoires, générant des piles de documents plus grandes que l'homme. Enterrées quelque part dans cette mer de papiers, se trouvent les pétitions qu'il a déposées au nom de son fils perdu.
Marchant à grands pas dans le bureau animé, il demande au premier greffier qu'il voit s'il y a eu des nouvelles de l'Amérique.
Scott Carney est un journaliste basé à Chennai, en Inde. Cette histoire a été financée en partie par le Fonds pour le journalisme d'investigation.
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Suivi de ce cas sur le blog Scott Carney. Meet the Parents: When Adoption Means Kidnapping
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