23 sept. 2008

Adopt villages, not pet children

Traduction de l'article de Bashir Goth, paru dans OnLine Opionion, le 14 novembre 2006.

Adoptez des villages, pas des enfants de compagnie.

L'actuel engouement des célébrités pour adopter des enfants m'a emmené dans le passé. J'étais à l'hôpital de Hargeisa, le Somaliland d'aujourd'hui, à un très jeune âge pour des blessures que j'avais subies après un raid aérien sur notre village frontalier.

Étant très jeune, environ sept ans, et en raison de manque de lit vide dans la salle des hommes, j'étais admis à la salle des femmes. Un jour, une Américaine, une enseignante du Corps de la Paix (Peace Corps), m'a visité. Elle était en train de marcher à l'extérieur et elle m'avait vu par la fenêtre. Elle s'est arrêtée et m'a regardé pendant un certain temps. Ensuite, elle est entrée dans la salle et a demandé l'autorisation au personnel infirmier de me parler. Elle s'est assise à côté de moi sur le lit, a tenu ma main droite dans ses deux mains et m'a regardé avec des yeux maternels, pleins de bonté et de curiosité.

Comme je ne pouvais pas parler l'anglais à l'époque, nous avons communiqué par des moyens naturels: le toucher, le regard et les sentiments. Pour une raison inconnue, je sentais que cette étrange femme blanche assise à côté de moi et tenant ma main n'était pas du tout une étrangère. Je me sentais comme si je la connaissais depuis toujours. Je me sentais à l'aise en sa présence, et j'étais saisi par un étrange sentiment non seulement de familiarité mais d'amour maternel.

Après plus de 40 ans, je peux encore voir son visage. Je peux voir une femme à la fin de sa vingtaine, un peu charnue, avec un visage angélique, un regard timide et un sourire retenu. Elle me disait quelques mots et lorsque je ne pouvais pas répondre, elle appelait le personnel infirmier, Sakin Jirde, pour nous traduire. Sakin m'a dit que la dame américaine dont je n'ai jamais appris le nom voulait me visiter tous les jours et m'enseigner l'anglais. J'ai accepté immédiatement. Puis elle m'a laissé, mais pas sans m'avoir donné un coup maternel sur ma tête.

Dès qu'elle m'a laissé, j'ai ressenti la solitude. Je l'ai regardée pendant qu'elle me quittait et elle m'a jeté un regard à plusieurs reprises. Pour les six prochains mois, elle est venue me voir presque tous les soirs et elle m'a enseigné l'anglais. Elle m'a apporté un livre intitulé "Fifty Famous Fairy Tales" (Cinquante fameux contes de fée) qui est toujours en ma possession. Lorsque le moment de son départ s'est approché, elle a montré son intérêt à m'adopter. Elle disait qu'elle m'aimait tellement qu'elle voulait faire de moi son fils. J'avais aussi développé une grande affection pour elle. Un mot a été envoyé à mon père et sa réponse est revenue avec un simple "Non".

La femme américaine ne voulait pas renoncer et elle a demandé au personnel de l'hôpital de convaincre mon père qu'on me donnerait de bons soins médicaux et un enseignement de qualité en Amérique et qu'elle m'emmènerait visiter ma famille une fois tous les deux ans. Mais la réponse de mon père était encore négative.

J'aimais mon père, ma mère, mes frères et sœurs et mon village Dilla, mais si j'avais eu le choix ce jour-là, j'aurais peut-être accepté d'aller avec la femme américaine parce que nous avions eu un véritable sentiment de relation mère-fils l'un pour l'autre et j'avais un tel désir ardent d'apprendre l'anglais et de parler comme elle. Nous nous sommes quittés les cœurs brisés. Quand je suis sorti de l'hôpital et suis retourné à la maison, je ne pouvais pas m'arrêter de pleurer pendant une semaine entière.

En regardant rétrospectivement l'événement, je ne peux qu'admirer la sagesse de mon père pour avoir suivi sa propension parentale qu'aucun autre amour ou confort matériel n'égale jamais un père regardant son propre enfant grandir devant ses yeux et lui transmettant la culture de son peuple et son histoire. Je me demande si ma culture et mon village auraient eu une place dans mon cœur si j'avais été élevé à l'étranger.

J'ai rapporté cette histoire pour montrer qu'il y avait un temps où l'adoption d'enfant était un cas d'un sentiment fort et véritable de maternité qu'un enfant étranger avait suscité dans le cœur d'une femme. Un sentiment qui a grandi avec le temps jusqu'à ce qu'il devienne impossible de nier.

Cela est contraire à ce que nous voyons aujourd'hui avec les célébrités américaines qui vont sur une frénésie de magasinage pour un enfant en Afrique et dans d'autres pays pauvres. Ça les frappe juste comme ça - pour obtenir un frère-jouet ou un sœur-jouet pour leurs enfants choyés - et tout ce que ça prend c'est un voyage excessivement médiatisé dans le marché africain pour afficher de pauvres enfants nus et choisir le meilleur jouet que l'argent peut acheter pour satisfaire leur fantasme: tout comme ils arriveraient à la boutique la plus proche pour satisfaire leur besoin de la dernière accessoire à la mode.

Tout comme les Européens justifiaient la ruée pour l'Afrique au 19ième siècle et la traite des esclaves avant cela comme étant le désir de l'homme blanc de civiliser le "demi-diable et demi-enfant", les célébrités d'aujourd'hui justifient le braconnage d'enfants au nom de la philanthropie et de l'altruisme: sauver les enfants pauvres du cœur de l'obscurité et les emmener dans le monde de la lumière.

Toute personne qui pense que mon argument est injuste ou hostile devra me convaincre du contraire. Comment une personne peut-elle aller dans un orphelinat d'un pays étranger pauvre, demander aux enfants de se défiler pour eux, prendre un "chanceux", payer comptant et s'en aller avec leur proie.

L'adoption par elle-même est une véritable nécessité de l'homme et une action noble qui donne un enfant à une personne sans enfant et un bon foyer, le confort et un avenir à un orphelin ou un enfant frappé par la pauvreté. Mais les enfants dans le besoin sont partout: ils sont en Amérique comme ils sont en Afrique et en Asie. Mais pourquoi les célébrités n'adoptent-elles pas les enfants d'Amérique au lieu d'aller à l'étranger pour adopter des enfants africains ou asiatiques?

La réponse est: il n'y a pas d'enfant à vendre en Amérique. Toute personne qui veut adopter passe par des années de procédure épuisantes pour se qualifier pour l'adoption d'enfant. Là-bas, les enfants sont des êtres humains et ne peuvent pas être achetés comme des jouets, des jeux ou des animaux pour les enfants des célébrités. Mais en Afrique, les gens sont encore vendus en échange de perles, de tabac et de la petite caisse. Et comme un journaliste du Malawi a déclaré, "Nous sommes en train de montrer au monde que notre pauvreté s'est étendue au cerveau".

Quelqu'un pourrait toutefois demander si ces stars sont vraiment honnêtes au sujet de leurs sentiments pour aider les enfants pauvres d'Afrique et d'Asie? Sans aucun doute, parfois le plus honnête des sentiments peut être déformé par les moyens avec lesquels ils sont accomplis. Changer l'adoption d'enfants en un shopping est une représentation grotesque d'un geste noble. Mais avec de tels grands cœurs et des sentiments philanthropique de sauver les enfants du monde, les célébrités peuvent faire un meilleur travail et sauver plus d'enfants de la pauvreté s'ils adoptent des villages entiers en Afrique et en Asie au lieu de seulement un ou deux enfants.

En fournissant des écoles, des cliniques et des puits d'eau à des villages entiers, nous aurons des milliers de jeunes Zaharas et David Bandas devant leur bien-être et leur avenir à la charité des célébrités. L'Afrique tirerait de grands revenus comme les visiteurs curieux s'assembleraient en foule pour voir et apprendre des villages d'Angelina Jolie et de Madonna. Ça apporterait un changement radical sur notre façon de faire la charité et l'aide étrangère et ça incarnerait la quintessence de l'altruisme de l'ouest et la philanthropie. La chanteuse colombienne Shakira montre déjà le chemin de cette direction et c'est une direction qui vaut la peine d'être imitée.

Les oeuvres de charité de la chanteuse colombienne Shakira: (du site Look to the Stars)

Pies Descalzos
(Barefoot Foundation) Fondé par Shakira, le but de cet organisme est d'améliorer l'éducation, la nutrition et la vie des milliers d'enfants déplacés vivant dans des conditions périlleuses en raison de violent conflit interne en Colombie.

Autres œuvres supportées par Shakira:

ALAS

Global Campaign for Education

One Campaign

Treatment Action Campaign


Uniceff

Somos Children's Village

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